DE LA PAROLE AUX ACTES : JUSTINE KASA-VUBU INTERPELLE ELIO DI RUPO

Justine Kasa-Vubu vient de nous faire parvenir le courrier (que nous reproduisons ci-après dans son intégralité) qu’elle a envoyé à Elio di Rupo suite à la controverse suscitée par la décision du Conseil Communal de la Ville de Mons en Belgique – dont Elio di Rupo est le Bourgmestre – d’inaugurer un monument à la gloire de Lumumba, « Père de la Nation Congolaise », titre que nous contestons formellement.

Cette réaction de Justine Kasa-Vubu fait suite à notre post du 19.09.2017 intitulé « JOSEPH KASA-VUBU OU LA DEUXIEME TRAHISON DES BELGES » dans lequel nous avons interpellé Justine Kasa-Vubu sur ce « détail de l’Histoire ».

Espérons que cette courageuse démarche aboutisse !

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Madame Justine M’Poyo Kasa-Vubu, Ministre Résident Ambassadeur Honoraire.

A l’attention de S.E. Mr. Elio di Rupo, Premier Ministre Honoraire, Ministre d’Etat, Président du Parti Socialiste – Bourmestre de Mons / 13, Blvd. de l’Empereur, 1000 Bruxelles.

Concerne : Mon Indignation suite à la Décision du Conseil Communal de Mons le 12.09.17

Monsieur Le Premier Ministre,

Je me permets de vous adresser cette lettre pour vous exprimer mon indignation suite à la décision prise par le Conseil Communal de Mons le 12 Septembre 2017 concernant la RDC et plus particulièrement à propos de l’entendement qui est donné sur le Père de l’Indépendance Congolaise.

Selon le Conseil Communal de Mons, Mr. Patrice Emery Lumumba, ancien Premier Ministre serait le Père de l’Indépendance du Congo. Non seulement cela ne correspond en rien à la réalité historique mais cela relève de l’offense faite à la mémoire car c’est une falsification de l’histoire de notre pays puisque le vrai Père de l’Indépendance c’est le Président Joseph Kasa-Vubu. La plupart des historiens belges le savent.

Je me permets de vous rappeler , Monsieur le Premier Ministre, que le tout premier geste politique de Kasa-Vubu fut posé en 1946 avec son discours sur « Le Droit du Premier Occupant », un thème qui traitait déjà des drames que nous vivons aujourd’hui en 2017 autour de l’expropriation de nos terres par des prédateurs étrangers néo-colonialistes, peu scrupuleux du droit légitime des autochtones à disposer de la terre de leurs ancêtres.

Par la suite, il y eut la publication en 1955 du Plan de Trente ans pour l’Emancipation du Congo du Professeur Jef Van Bilsen qui suscita des réactions dans la Colonie, dont celles de quelques « Evolués » réunis autour de Monseigneur Malula qui rédigèrent le Manifeste de Conscience Africaine en 1956.

Dans la publication en 1956 du Contre Manifeste du parti politique ABAKO dirigé par Joseph Kasa-Vubu répondant au Manifeste de Conscience Africaine, le mot « indépendance » figurait déjà dans les revendications de l’ ABAKO.

Par ailleurs, c’est le 20 avril 1958 que, dans son allocution d’investiture en qualité de Bourgmestre de la Commune de Dendale à Léopoldville devenue Kinshasa, que Kasa-Vubu déclara « Nous voulons l’indépendance immédiate » ! Officiellement ! D’ailleurs cette allocution de Kasa-Vubu en 1958 lui valut des réprimandes de la part des autorités coloniales ainsi que des privations de salaire car ce discours fut considéré comme un affront par rapport à la politique coloniale et à la déontologie des fonctionnaires. Il faut savoir que tous les autres partis politiques congolais, y compris le MNC parti politique de Lumumba, n’emboîtèrent le pas pour réclamer l’indépendance qu’ APRES l’offensive de l’ABAKO.

Que la Belgique aujourd’hui, rongée par les remords veuille encore à travers la ville de Mons s’excuser de l’assassinat du Premier Ministre Lumumba survenu en janvier 1961, dont la Commission Lumumba entre 1999-2002 au Parlement Fédéral Belge avait établi officiellement les responsabilités de la Belgique, cela nous pouvons le comprendre. Mais occulter le rôle du Père de l’Indépendance Joseph Kasa-Vubu et décréter que ce rôle est dévolu à Lumumba, cela relève de la falsification historique inacceptable. Nous en avons été choqués non seulement en tant que membres de la famille biologique de Kasa-Vubu, mais également en tant que membres de la Communauté congolaise.

Les archives existent ici en Belgique dans toutes les Académies d’Histoire, les Ministères concernés par l’époque coloniale, la Bibliothèque Royale, les Universités , le Musée de Tervuren , les Associations d’anciens Coloniaux, notamment.

De surcroît, il nous est difficile d’imaginer, Monsieur Le Premier Ministre, que vos responsabilités au sommet de l’Etat belge en tant que Premier Ministre et Ministre d’Etat aient pu vous éloigner de la vérité de l’Histoire coloniale que de telles fonctions obligent.

Nous pensons donc qu’il est encore temps d’apporter rapidement les rectifications nécessaires, car nous n’osons imaginer les conséquences que cette faute grave produira demain sur les jeunes belges descendants d’ancêtres congolais issus des diverses provinces qui, à l’occasion d’une excursion scolaire seraient en train de se bagarrer devant un fronton communal, prétendant telle vérité enseignée par leurs parents, telle autre vérité enseignée par le Collège Communal. Nous n’osons imaginer de telles bagarres qui risquent de conduire nos futurs petits enfants belges issus de l’immigration congolaise vers le radicalisme car il n’y a rien de plus désastreux que le révisionnisme de l’histoire.

A moins que la décision du Conseil Communal de Mons ne
soit l‘expression délibérée d’une nouvelle réorientation politique belge sur la manière de voir le Congo et ses populations, afin de chercher à se substituer durablement à ses leaders authentiques pour mieux les confiner dans le carcan d’humiliations répétées.

Je reste à votre entière disposition et à celle du Conseil Communal de Mons pour en discuter de vive voix.

Dans l’attente de ce rendez-vous, veuillez croire, Monsieur le Premier Ministre, à l’assurance de ma très haute considération.

Mme Justine M’POYO KASA-VUBU

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